quelques jours, seulement, saupoudrés uniquement de quelques messages ;
et déjà, swann avait terriblement hâte de te revoir.
pour une raison tout à fait mystérieuse ; un mystère renchéri par l'idée qu'il n'a même pas osé te proposer une nouvelle sortie.
du moins, pas avant aujourd'hui.
le soleil resplendit, et malgré le froid hivernal, il fait un temps magnifique ;
et tout de même assez chaud, pour ce début de mois de février.
alors swann n'a pas hésité à sortir. il voulait profiter de la vue sur la mer,
de ses tons grisonnants dans les températures sont basses, et surtout,
du calme qu'elle inspire, en plein hiver, quand personne n'est aux alentours.
swann adore aller à la plage en hiver, il se sent coupé du monde ;
comme s'il n'était pas au bon endroit au bon moment, mais que quelque part,
sa place aurait toujours dû être ici.
alors armé de son appareil photo, et pieds nus dans le sable, il a capturé chaque instant faisant parler son coeur,
jusqu'à ce que l'envie ne le traverse, de partager ça,
avec toi.  
swann a donc dégainé son smartphone pour te proposer de le rejoindre ;
et à sa plus grande surprise, tu as accepté.
totalement enchanté à l'idée qu'il va te voir peindre, il est retourné à ses photos en t'attendant, si calmement.

debout sur une crique de rochers, penché en avant et concentré, il ne t'entend pas arriver.
tellement dans son monde...
qu'il sursaute presque lorsqu'il entend enfin ta voix s'élever, parmi les cris des mouettes et le bruissement des vagues.
il abandonne alors ce qu'il faisait pour descendre de son perchoir, et se dirige vers toi pour te rendre ta poignée de mains, l'air enchanté,
avec ce sourire resplendissant ; et étrangement,
toujours sincère, quand il t'est adressé.

- bonjour ! je suis content que tu sois là.

et pour cause, il ne s'attendait pas à ce que tu viennes vraiment,
et encore moins avec tout ton matériel pour peindre...
mais il se sent vraiment ravi, et quelque part, un peu privilégié,
que tu fasses de lui ton premier accompagnateur en dehors de ta mère,
et que tu le laisses voir tes peintures...
ta question le fait doucement rire, et il secoue la tête,
avant de désigner du doigt, l'amas de rochers où il était perché.

- pas du tout, ne t'en fais pas.
j'ai repéré des crabes par là-bas, j'étais content de voir qu'ils sont toujours aussi bien conservés.

c'est une sorte de fierté d'avoir un tel animal pour mascotte,
alors il comptait bien en prendre plusieurs clichés pour les poster après.
puis tu vas t'installer pour peindre, alors swann ne te dérange pas dans ta réflexion.
il retourne se hisser sur les roches, pour photographier les crustacés ;
et ne revient vers toi qu'ile fois satisfait, pour jeter un oeil à ton tableau, déjà bien avancé...
il ne fait aucun commentaire, observe simplement tes gestes fluides et experts ;
avant d'oser se risquer à formuler une petite curiosité.

- tu reproduis exactement ce que tu vois, ou tu t'en inspires simplement ?

c'est murmuré d'une voix très basse, comme s'il avait peur de te déconcentrer,
et sa question est sincère ;
lui qui n'a toujours fait que de la photo, se demande sincèrement,
ce qui peut bien passer dans l'esprit des artistes qui créent...

penché en avant, le visage juste à côté du tien,
swann a le regard totalement rivé sur ta toile. sa concentration oscille entre le tableau et le paysage réel qu'il représente,
puis tu tourne ton visage vers lui ; swann reste muet un instant,
surpris par cette proximité qu'il n'imaginait pas si vive.
son regard se noie un instant dans le tien, immobile, stoïque,
puis tu lui souffles ta réponse, et c'est comme s'il se reconnectait soudainement.
alors il hoche vaguement la tête,
reste concentré sur ta peinture,
avant qu'une nouvelle surprise le prenne, quand tu lui demandes son avis.
swann recule légèrement, pour voir l'oeuvre d'un peu plus loin ;
il semble parfaitement concentré,
et réfléchit un temps, en observant, avant de formuler la réponse.

- humm... ça ressemble à une photo. et en même temps, non.

les doigts repliés contre ses lèvres et les sourcils légèrement froncés,
il marque une petite pause,
avant de reprendre ;

- je veux dire que, c'est vraiment bien fait, c'est très réaliste et tout ça, de ce côté là, tu as totalement réussi.
et il y a, en plus, cette espèce de... de touche artistique ? tu t'es totalement approprié le paysage, pour le reproduire mais, à ta manière. et ça rend le tableau encore plus fascinant.

swann a sorti tout ce qui lui passait par la tête sans trop y réfléchir,
et il ignore si il a été totalement clair,
et espère même que tu ne te vexeras pas ; alors qu'il t'a fait, à ses yeux, un très beau compliment.
il se rapproche alors une nouvelle fois de toi,
et vient doucement ébouriffer tes cheveux blonds, très doucement,
avec une sorte de tendresse touchante.

- bravo, l'artiste.

puis il passe devant toi pour retourner tout près du bord.
les pieds dans l'eau gelée, il reprend des photos, profite des changements de lumière et de cadre modifiés par les heures qui passent,
puis une fois qu'il est satisfait, il revient vers toi.
un rapide coup d'oeil à ta toile pour vérifier son avancée,
et sans un son, sans même se soucier de si tu l'as vu ou non,
il pose son appareil, pour s'allonger dans le sable, tout près de toi.
paisible, il ferme les yeux et savour simplement le moment ;
la tranquilité et la serenité d'un instant calme,
partagé avec toi, sans une parole échangée.

parce que cet instant s'inscrit dans l'un de ces moments,
des moments simples et féériques,
où les mots sont inutiles...

en tant qu'artiste, swann comprend parfaitement ce que c'est ; de recevoir des compliments sincères mais néanmoins peu constructifs.
une petite critique, même positive, de temps en temps, fait un bien fou ;
swann le sait. lui qui collectionne les commentaire sur ses photos,
de ses abonnés qui lui disent que c'est "trop beau" sans être capable de dire pourquoi.
c'est un plaisir un peu frustrant, swann le sait très bien ;
et c'est pour cette raison-là, qu'il a essayé comme il a pu, de te faire un véritable compliment.
il n'y connait pourtant rien en peinture ; c'est donc que ce n'est pas si compliqué,
de donner un avis constructif sur une oeuvre qui lui plait...

les heures ont filé calmement, et swann est resté silencieux.
un silence reposant, bercé par le bruissement des vagues, le chant des mouettes,
dans une symphonie paisible offerte par la nature elle-même.
swann est resté là, allongé sur le sable.
il a regardé les nuages passer, observé les va et viens de la mer sur le sable,
les bateaux passer, les oiseaux voler.
il a aussi parfois regardé son téléphone, vaguement,
et parfois, jeté des coups d'oeils curieux mais discrets, à l'avancée de ton tableau.
puis le soleil se couche doucement au loin, et swann admire ces nouveaux coloris.
il adore regarder les crépuscules sur l'eau, totalement fasciné ;
mais il y a quelque chose qui à cet instant même, le fascine soudainement encore plus :
cette douce risette qui vient de se peindre sur ton visage,
à son attention.
c'est un sourire indescriptible, ampli d'un simple bien-être, d'un bonheur infini d'être là.
swann sent sa petite pompe s'emballer brusquement,
car c'est bien la toute premère fois, que tu te dévoiles autant.
puis il te rend ton sourire avec la même sincérité.

perdu dans les aléas de son organe vital bien trop affolé,
il ne remarque qu'à peine que tu ranges tes outils ;
semble même, ne retrouver pied à la réalité, que quand il te sent t'installer à ses côtés.
alors un étrange élan le prend tout à coup,
et il passe délicatement son bras autour de ton épaule.
simplement, sans arrière-pensée, juste pour signifier combien il se sent bien, serein, apaisé.
sans te brusquer, sans te forcer ; une attention délicate,
une légère volonté de proximité.
puis quand il est sûr que tu ne fuiras pas, swann prend un nouveau risque,
et appuie doucement sa joue contre le haut de ton crâne.
ton parfum amplit ses poumons, alors swann sourit largement ;
et sans un mot, sans une explication,
c'est un léger baiser, à peine osé,  à peine esquissé,
qui se dépose contre ta chevelure d'or.

c'était totalement irréfléchi.
un geste spontanné, au naturel presque désarmant ; une simple envie,
un brutal désir de te montrer qu'il est heureux d'être proche de toi, et également,
qu'il aimerait que tu le sois aussi.
heureux d'être proche de lui, de voir cette amitié d'apparence improbable fleurir entre vous deux.
comme une toute petite graine qu'il aurait planté, par ces sms mensongers,
et qui aurait doucement germé.
un jour viendrait où une fleur sublime s'épanouirait, la fleur de cette relation singulière,
exceptionnelle, unique.
alors oui, swann souhaite de tout son coeur que tu ne prennes pas ce geste trop mal ;
mais ses lèvres se pincent d'un air désolé, face à ta frimousse paniquée.
swann rit légèrement, d'un air légèrement nerveux,
puis hausse les épaules délicatement.

- bah, je t'ai fait un bisou sur la tête.

affirme-t-il, comme si c'était parfaitement normal.
et pour lui, ça l'est ; tout du moins, ça le semble.
il n'est pas siaffectueux avec ses amis les plus proches, pas même rosemary,
et il ne pourrait même pas expiquer ce qui lui a pris.
mais il imagine bien que tu vas lui demander pourquoi il a fait ça ;
alors il ne t'en laisse pas le temps, et reprend soudainement la parole,
le regard rivé vers l'horizon, vers cette immense sphère de feu qui disparait lentement derrière l'infinité de l'océan.

- je suis juste...
je me sens bien avec toi.

avoué d'un murmure timide, comme seule justification de son geste.
son visage se tourne une nouvelle fois vers toi, et c'est une nouvelle risette sincère qu'il t'offre délicatement.
il semble sourire avec tout son coeur, et s'ouvrir totalement à toi ;
tu ne le sais peut-être pas, mais tu es le seul, en dehors de rosemary,
à pouvoir le voir comme ça.
si calme, si paisbible, si sage,
loin de l'agitation euphorique du personnage qu'il s'est forgé.
alors il espère que ce que tu peux voir te plait ;
que tu sois sensible à ce vrai lui qu'il te dévoile.
puis sa mine se fait confuse. son sourire perdure, mais ses yeux se rivent sur le sable,
qu'il agite lentement du bout du doigt,
semblant chercher ses mots, d'un air presque désolé ;
car c'est sa plus grande crainte, au fond, de te brusquer...

- désolé si ça t'a déplu...

son regard se voile d'un attendrissement certain, quand il te voit agir de manière si enfantine ;
et, admettons-le, si mignonne.
un sourire se peint sur ses lèvres et semble ne jamais pouvoir s'en effacer.
alors swann hoche lentement la tête à tes paroles réconfortantes ;
il se sent rassuré, que tu n'aies pas mal pris son geste.
c'était sa plus grande frayeur - ça l'est toujours, d'ailleurs -
de te brusquer, d'aller trop loin ou trop vite, de te faire fuir.
car cette amitié naissante semble si belle, si bien partie,
si pleine de promesses, qu'il s'en voudrait éternellement, de la briser,
avant même qu'elle n'ai vraiment commencé...

swann s'émeut doucement et sourit un peu plus,
puis c'est un rire un peu nerveux qui franchit ses lèvres étirées, jusqu'ici scellées.
alors il se reconcentre sur le ciel qui s'assombrit paisiblement,
et l'atmosphère qui revêt avec lenteur et délicatesse, son manteau indigo de la nuit.

- je suppose ? j'ai pas vraiment de proches non plus...
ça m'est juste venu comme ça.

et bizarrement, ça ne semble pas le déranger plus que ça ;
ne pas avoir beaucoup de proches, pour pouvoir au final, mieux profiter de chacun d'entre eux.
alors swann finit par s'allonger une nouvelle fois sur le sable, et sans lâcher ton épaule, il t'entraine de ce fait avec lui.
son regard sombre scrute les premiers points lumineux qui peinent à poindre timidement dans les cieux ;
puis il tourne son regard vers toi, et il croit bien les voir briller dans tes yeux.
il murmure alors, d'une voix profonde et presque absente :

- bien sûr. tu pourras toujours compter sur moi.

avoué avec sincérité, et saupoudré d'un flot de tendresse.
swann regarde alors, ton visage parfait qui semble avoir été sculpté par les anges,
son regard s'attarde sur chaque partie de sn jolie faciès ;
jusqu'à s'attarder sur tes deux mignonnes lèvres délicatement rosées.
swann se surprend à imaginer leur douceur et se demander comment elles seraient contre les siennes...
puis il se reprend, et se râcle légèrement la gorge pour se reconcentrer sur le ciel étoilé ;
avant de calmement, et d'une voix claire, ajouter :

- ça sert à ça, les amis.
non ?